Made in Germany

Le modèle allemand au-delà des mythes

Autor/Hrsg Auteur/Editeur: Duval, Guillaume
2013, Seuil, Paris, ISBN10: 202109779X

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Rezension / Compte rendu:
Dix visions ou divisions ?
Le franco-allemand et l’Europe en librairie

Le 50e anniversaire de la signature du Traité de l’Elysée a motivé de nombreux auteurs à publier des ouvrages sur la relation franco-allemande. On constatera que le nombre de publications en France est largement supérieur à celui des livres publiés sur le même sujet en Allemagne.

Visionen oder Divisionen?
Der 50. Jahrestag der Unterzeichnung des Elysée-Vertrages am 22. Januar 2013 hat eine Fülle von Veröffentlichungen über die deutsch-französischen Beziehungen mit sich gebracht; nicht nur Verlage, sondern auch deutsch-französische Gesellschaften, Universitäten, Forschungsinstitute, Zeitschriften u. v. a. m. haben sich das Jubiläum nicht entgehen lassen – in Frankreich allerdings deutlich mehr als in Deutschland. Dokumente/Documents stellt eine Auswahl vor.
Red.

Cet intérêt français pour le dialogue entre les deux pays tient en partie au fait au débat suscité lors de la campagne pour les élections présidentielles de 2012, au cours de laquelle l’Allemagne a maintes fois été présentée comme un modèle (ou son contraire). Le couple franco-allemand s’inscrit donc aussi et surtout dans l’analyse que font les Français sur leur voisin d’outre-Rhin. Vouloir citer tous les ouvrages parus dans ce contexte tient de la gageure, tant il est vrai que nombreuses sont les institutions qui ont tenu à ne pas manquer le rendezvous de ces Noces d’Or : sociétés franco-allemandes, universités, instituts de recherche, mais aussi bien sûr de nombreuses revues.

Pour une réforme intellectuelle

Guillaume Duval, Made in Germany, Le modèle allemand au-delà des mythes. Seuil, Paris, 2013, 322 pages.
Ingénieur de formation, Guillaume Duval, qui a travaillé quelques années dans l’industrie allemande, fréquente régulièrement l’Allemagne depuis une quarantaine d’années ; actuellement rédacteur en chef du mensuel Alternatives économiques, il était bien outillé pour décrypter le modèle allemand, objet d’un vif intérêt dans une France qui doute d’elle-même et qui est à la recherche d’un exemple dont elle pourrait s’inspirer pour améliorer sa performance globale et redresser ses comptes. Plus spécifiquement, on l’incite à s’inspirer des réformes de Gerhard Schröder. Or, montre l’auteur, celles-ci, loin d’avoir défendu un capitalisme plus régulé, se sont caractérisées au contraire par une baisse des salaires et un démantèlement de l’Etat-providence. En réalité, poursuit-il, les succès de l’économie allemande restent surtout liés à des caractéristiques structurelles qui ont peu à voir avec les réformes tant vantées de Gerhard Schröder mais proviennent de la profondeur du tissu socio-économique allemand.
L’Allemagne, contrairement à la France, est un pays décentralisé dont les territoires n’ont jamais été entravés dans leur développement par le poids écrasant d’une capitale qui concentre tous les pouvoirs et tous les moyens. La population y est équitablement répartie, ce qui nécessite moins de transferts qu’en France. A titre d’exemple, elle compte 80 villes de plus de 100 000 habitants contre 41 en France.
Quelles leçons est-il possible pour la France de tirer de l’exemple allemand ? Elles découlent des constats faits par Guillaume Duval tout au long de ses analyses. Il lui conviendrait de tenter d’acclimater le système de codétermination et des pouvoirs étendus reconnus aux salariés dans les entreprises, d’adopter un style de management moins autoritaire et hiérarchique, de valoriser le travail industriel dans la société, de parvenir à plus de mobilité sociale, de refonder un système éducatif et de formation professionnelle (où le premier fonctionnerait moins par la sélection par l’échec), de mieux organiser les territoires, sans parler de rééducation du poids de la fonction publique, de l’empilement des compétences territoriales, des cumuls... Une véritable réforme intellectuelle et morale, du type de celle qu’avait prônée Ernest Renan en son temps.
Eugène Berg

Polémique franco-française

La presse française n’a pas manqué de relever la parution de l’ouvrage de Guillaume Duval, « un livre décapant », écrit par exemple Le Nouvel Observateur qui publie quelques bonnes pages – six idées reçues que l’auteur démystifie en démontrant que l’agenda 2010 du chancelierGerhard Schröder n’est pas un remède miracle, que les Allemands ne travaillent pas plus que les Français, que l’avenir ce n’est pas l’apprentissage, que l’Allemagne n’est pas un pays d’ingénieurs, que le vieillissement de la population ne justifie pas l’austérité et que l’Allemagne n’a pas réglé le problème des retraites. Et pour être sûr d’avoir été bien compris, l’hebdomadaire revient à la charge une semaine plus tard en affirmant qu’au bout du compte, « c’est à la bêtise collective – la nôtre – que nous renvoient ces analyses ». Jean-Claude Guillebaud se demande en effet « comment le discours dominant peut-il, mois après mois, ensorceler le débat démocratique au point que se trouvent colportées, reprises, clamées, pieusement commentées des âneries aussi manifestes » sur ce qu’il est coutume d’appeler hâtivement le « modèle allemand ». Sa conclusion est sans appel : « Le vieux cantique sur le ‘modèle’ est d’autant plus exaspérant qu’il est toujours idéologiquement orienté : pousser sans cesse les Français vers le ‘moins social’. C’est à la fois très bête et très simple ». L’hebdomadaire Le Point ne partage pas du tout cet avis. Lui aussi commente l’ouvrage, mais parvient, sous la plume de Franz-Olivier Gisbert, à la conclusion que cette « descente en flammes du modèle allemand » correspond en réalité à « une spécialité gauloise que de hurler au libéralisme, qualifié de néo, d’ultra ou de sauvage, dès qu’un pays obtient de bons résultats économiques ». Pour l’éditorialiste du Point, l’auteur de Made in Germany « incarne superbement ce que nos collègues anglo-saxons appellent le déni français, un mélange d’isolationnisme, de repli sur soi et de complexe de supériorité, les trois matrices du déclin ».
Gérard Foussier

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