Énergie : Un défi mondial

Heureuse coïncidence de l'actualité. Alors queDocuments préparait avec Dokumente un dossiercommun sur l'énergie pour le dernier numéro del'année, le Prix Nobel de la Paix 2007 était décernéà l'ancien vice-président américain Al Gore (etau Groupe intergouvernemental d'experts surl'évolution du climat GIEC) « pour leurs efforts decollecte et de diffusion des connaissances sur les changementsclimatiques provoqués par l'Homme et pouravoir posé les fondements pour les mesures nécessairesà la lutte contre ces changements ». Écologie = paix.Le Prix Nobel remet en vedette cette équation, quifaisait sourire dans les années 80, lorsque les Vertsen Allemagne déclaraient la paix au monde enmanifestant contre la construction de centralesnucléaires ou en prônant la promotion de l'énergieéolienne et solaire. La distinction si convoitéechaque année confirme le bien-fondé des dispositionsprises en 2007 sur ces questions par l'Unioneuropéenne sous la présidence allemande de lachancelière Angela Merkel. Les décisions en faveurd'une réduction des gaz d'échappement sont doncdes mesures qui concernent la politique énergétiquede l'Europe, en tant que modèle pour le restedu monde – une politique énergétique inscritedans un cadre environnemental pour assurer lapaix sur la planète.Il y a bien sûr de nombreuses possibilités d'interpréterles distinctions qui honorent ceux qui enbénéficient pour des raisons diverses, parfois plusou moins justifiées. Les Prix Nobel n'échappentpas à la règle. On peut effectivement contester lebien-fondé de tel ou tel autre choix. Tout commeon peut s'en féliciter. Cependant ceux qui aurontété tentés de transformer le Prix Nobel de physique2007 en une nouvelle preuve exemplaire dela coopération franco-allemande, devront secontenter de constater qu'en fait les deux physiciensrécompensés, Peter Grünberg dans les laboratoiresd'Allemagne et Albert Fert dans lescentres de recherche français, ont découvert l'effetphysique de la magnétorésistance géante, dont onnous dit qu'il a influencé notre vie quotidienne,simultanément, mais séparément.Là est le véritable symbole : simultanément,mais séparément.Là est la véritable interprétation : Français etAllemands devraient prendre davantage consciencequ'ils sont dans le même bateau, qu'ils sontconfrontés aux mêmes problèmes et surtout qu'ilserait préférable et raisonnable de travailler maindans la main pour trouver, ensemble et plus rapidement,les solutions aux défis de ce monde. Carle plus souvent, il n'y a pas plusieurs, mais uneseule solution.La boucle est bouclée. Enfin, presque, car ledossier ouvert par Documents et Dokumentemontre combien les appréciations restent divergentes,notamment entre la France et l'Allemagneà propos du nucléaire. D'un côté, une politiquerésolument axée sur les nouvelles générations dela technologie de l'atome, peu polluante entermes de CO2, même si l'épineuse question dustockage des déchets radioactifs est largementescamotée dans ce débat. De l'autre, une politiquede sortie du nucléaire, voulue par l'ancienchancelier social-démocrate Gerhard Schröder etses alliés Verts, mais que la chancelière chrétienne-démocrate, ouvertement favorable au nucléaire,ne veut pas remettre en cause pour ne pas fragilisersa coalition avec les sociaux-démocratesjusqu'en 2009.Alors que le sommet européen de mars 2007 arepris les objectifs « contraignants » de 20 %d'énergies renouvelables dans le bouquet énergétiquede l'Europe en 2020, nombreux sont lesobservateurs et experts qui doutent, surtout si l'optionnucléaire est abandonnée par certains pays etque la dépendance envers des pays tiers est réviséeà la baisse. L'explosion du prix de l'essence à lapompe, aussi douloureuse soit-elle, est peut-êtreune chance pour les pays-membres de l'Unioneuropéenne de prendre enfin les décisions qui s'imposentpour redéfinir une vraie politique énergétiquede l'Europe. Simultanément, et pas séparément. Gérard Foussier